Le collectif TOPOI expérimente des dispositifs de réciprocité * par une approche partagée des territoires qu’il traverse. Parce que l’urbain est l’affaire de tous, la conception des espaces publics ne peut se tenir à l’écart des gens qui les vivent. En d’autres termes, il s’agit de repenser nos espaces vécus communs par des pratiques collectives, ouvertes, transmissibles et fonctionnant en interaction.
Depuis 2003, nous avons expérimenté et affiné des séries d’approches sensibles et évolutives, qui se nourrissent des diversités de points de vue, des savoirs et singularités de chacun et de la complexité des systèmes à l’œuvre. Les protocoles mis en œuvre naissent des contextes urbains et humains pré-existants et construisent -par itérations et allers-retours successifs- les contenus et la pertinence de chaque projet.
Les actions et programmations urbaines proposées tentent de faire bouger quelques lignes au passage, elles révèlent et questionnent les situations rencontrées sous formes de traces inscrites, dessinées, superposées et transmissibles, de strates de savoirs, de cartes, de récits, de sons, d’images, de réseaux croisés. Ces expériences collectives engagent des processus qui ne peuvent prendre consistance que dans l’échange et le jeu d’interactions entre les acteurs en présence.
Il s’agit d’une démarche contextuelle et inclusive qui suppose la prise en compte d’une forme de réciprocité des savoirs entre les différents intervenants et contributeurs concernés, qu’ils soient « habitants » -des espaces de logement, de travail ou des espaces publics- riverains, commerçants, artisans, techniciens, passants réguliers, quotidiens ou plus ponctuels et/ou qu’ils soient les concepteurs, décideurs, élus, architectes, artistes, urbanistes, chercheurs, étudiants ou acteurs culturels impliqués dans les projets en question.
Nous évitons toute forme qui serait trop fermée ou préméditée, aucune recette pré-écrite n’est de mise. Nos pratiques laissent la place à l’autre, à la rencontre, à la transmission, à l’inédit et à l’improvisation. Nos dispositifs restent ouverts, ils évoluent et se nourrissent des dissensus, de la multiplicité des points de vues, des approches, des vécus et des contextes. Les contenus émergent au fur et à mesure autour d’ateliers publics in-situ menés sur des temps adaptables (de quelques jours à plusieurs années). L’intention sera toujours de creuser les questions soulevées sur plusieurs échelles temporelles du projet : à court, moyen et long terme.
Notre démarche nécessite forcément des espaces et des supports de partage réflexifs, interactifs, itératifs, conçus autour des savoirs croisés. Ces interfaces -fixes ou mobiles- sont considérées comme des outils d’analyse urbaine, de reconnaissance, de compréhension, de considération, d’accueil et de restitution; elles prennent des formes multiples, évolutives et toujours spécifiques. Elles supposent d’être activées sous forme d’interventions publiques réalisées avec les contributeurs impliqués.
Les dispositifs déployés sont repensés à chaque nouveau projet : ré-activations de lieux -d’espaces publics ou de lieux (ré-)ouverts au public- (ré-)écritures de règles du jeu, cartographies sensibles individuelles et collectives, séries d’entretiens retranscrits, diffusés ou rejoués, itinéraires, parcours commentés et documentés, performances, restitutions, actions et diffusions dans l’espace public avec les communautés, groupes ou individus concerné.e.s.
Ces médiums développent des processus de singularisation des lieux partagés. Ils font apparaitre par la superposition de données subjectives des points particuliers, des attracteurs étranges. Ils sont un moyen d’appréhension collective, de compréhension et d’analyse approfondies d’un territoire (ou d’un lieu) qui viennent définir les contenus et la pertinence des programmations urbaines et architecturales coproduites.
Il s’agit d’une approche holistique de la conception urbaine, qui tente d’assurer une responsabilité collective de la fabrication de notre environnement, de traiter des enjeux et des décisions communes. Nous intervenons sous forme d’invitations et de collaborations avec des citoyens, artistes, chercheurs, enseignants, étudiants, sociologues, anthropologues, géographes, curateurs, médiateurs culturels, associations, collectifs et agences d’architecture et d’urbanisme, structures artistiques et/ou pédagogiques indépendantes ou académiques, équipes municipales, élus et tout autre personne ou structure préoccupée par les questions urbaines.
Flore Grassiot & Antoine Mialon,
architectes DPLG, scénographes & programmistes.
Champs spécifiques de pratiques : Diagnostics urbains et préconisations / programmations architecturales et urbaines / consultation, participation et implication citoyenne / ateliers publics et participatifs / médiation inclusive / implications et rapprochements de différents publics et milieux (artistiques, techniques, politiques, scientifiques, populaires) / enseignement (conférences thématiques et workshops) / méthodologies et pédagogies ouvertes / outils cartographiques et de conceptions collectives / actions urbaines / pratiques transversales et transdisciplinaires / art contemporain & architecture / urbanisme alternatif & anthropologie urbaine / scénographie urbaine et d’exposition / programmation d’expositions, d’installations, d’évènements et performances / organisation de rencontres, tables rondes et débats / concours de marché public et commandes privées / conception, montage et gestion de projets / .
*Les dispositifs de réciprocité
Plutôt qu’une exposition rétrospective de nos actions urbaines menées depuis 2003, en France, en Belgique et au Maroc, nous avons présenté au Syndicat Potentiel à Strasbourg ce que nous appelons les dispositifs de réciprocité déployés au fil des années, des projets et des contextes avec les acteurs urbains impliqués. Il s’agit d’interfaces d’échanges de savoirs, à la fois simples et évolutives, sur différents supports bricolés pour l’occasion et réadaptés à chaque situation.
Elles sont aussi une façon de rapprocher des milieux habituellement maintenus séparés, de mettre chacun sur un pied d’égalité donc de modifier sensiblement les rapports de forces et décisionnels, du moins le temps des projets. Ces renversements de rôles nous permettent notamment de reconsidérer les contextes étudiés, comprendre la complexité des situations urbaines à l’œuvre et finalement concevoir des modes d’actions collectives inédites et co-produites. Il s’agit ici de croiser nos démarches, de donner de nouvelles lectures transversales à nos parcours, à travers ceux mis en scène.
Ces interfaces d’échanges on été réactivées dans l’espace du Syndicat Potentiel. A la fois mises en jeu par le public et présentées en parallèle comme des objets-traces archéologiques de nos projets réalisés depuis 2003. Les contenus sont considérés comme des matériaux à restructurer; reliés par thématiques, dispositifs et protocoles, ré-agencés pour l’occasion.
Installation en complémentarité directe avec les rencontres du 8 octobre et en résonance avec le collectif HORIZOME, conçue dans l’idée que d’autres récits et d’autres fils soient tissés pendant toute la durée de l’exposition.